Il faut des nuits pour calmer la détresse
Se sentir nu au milieu des vitrines
Marcher à contre-pluie guettant les signes
Qui feront des rues un carnet d’adresses.
On peut faire semblant de tourner le coin
On attend des yeux au bord d’un trottoir
Pour s’accrocher au soir comme à l’espoir
D’un calme trouble à l’orée du matin.
Minuit qui passe et les visions s’enchaînent
Au bout de l’avenue tremble désert
Un grand espace que les néons lacèrent
Je suis le câble d’une télé sans chaîne.
Café de la gare un chien gris me connaît,
Une Marie-Blanche pâle d’ennui et de rêve
Murmure à ses clients s’ils font la grève
Qu’avant-guerre sa mère aussi se donnait.
J’aime à lui glisser des mots, regarde moi
Entre deux cachets blêmes Marie Blanche
Tes seins qui soupirent si lourdes tes hanches
De tous tes souvenirs as-tu gardé l’émoi ?
Ton chat qui meurt hier, manque de veine
Sous les roues, écrasé, d’un gros camion
Citerne en tournée de livraison
Et depuis tu n’as plus rien pour ta peine.
Laisse moi te dire à qui je ressemble
Pourquoi les jours blafards sont au dehors
Et les foules si denses quand tu l’endors
Laisse moi te dire comment tout me semble.
Tu m’expliqueras un soir quel est le salaire
De la peur et le prix que l’on paye
Pour trouver qui l’on a quitté la veille
Sans remords, sans une tache, exemplaire.